dimanche 17 novembre 2013

La nicotine est-elle responsable de la dépendance au tabac ?


Publié le 17 novembre 2013 par Gueule De Loup.
Je suis presque sûr que vous avez la réponse à cette question, car si il y a une idée forte dans le monde de la lutte contre le tabagisme c'est bien la responsabilité directe de la nicotine dans la dépendance du tabac.


De grandes recherches, principalement à visées pharmaceutiques, ont depuis longtemps tenté de démontrer que la nicotine était l'élément clé à intégrer dans les méthodes de sevrage tabagique car directement responsable de la dépendance du fumeur.


Les vidéos choc montrant les grands piliers de l'industrie du tabac déclarer l'un après l'autre en 1994 au Congrès des États-Unis : “Je pense que la nicotine n'est pas addictive” a sans doute symbolisé à tout jamais cette mauvaise étiquette de la nicotine.

Perçue comme un élément malsain et délibérément caché par les industriels, la nicotine est devenue l'ingrédient secret à l'origine des chiffres d'affaires les plus impressionnants de l'histoire du commerce moderne. C'est à cause de la nicotine que le fumeur ne peut pas s'arrêter de fumer.


Si l'idée me parait extrêmement plausible, j'ai pu découvrir au fil de mes lectures que tous les experts ne sont pas forcément d'accord sur cette relation de cause à effet, tout du moins émettent des nuances. Je partage donc avec vous les quelques recherches que j'ai pu effectuées et vous invite comme d'habitude à me laisser vos commentaires en bas de page.


Pour Robert Molimard, fondateur de la Société Française de Tabacologie, l’addiction à la nicotine est un mythe
Dans ce contre-courant scientifique il faut souligner la position du père de la tabacologie française, Robert Molimard, qui démystifie l'addiction à la nicotine. Selon lui “le tabac contient tellement d’autres substances, qui peuvent agir en synergie, éventuellement avec la nicotine, qu’on ne peut tirer une telle conclusion.


Même si Molimard soutient également l'idée selon laquelle cette conception de la nicotine addictive arrange bien l'industrie pharmaceutique pour nous vendre des substituts nicotiniques, je préfère laisser ce débat de côté pour le moment.


Pour illustrer en partie ses propos, Molimard évoque l'expérience de l'une de ses anciennes thésardes, C. Cohen. Cette chercheuse a mené en 2005 des expériences [2] sur des rats pour tenter de mettre en évidence les comportements addictifs associés à l'usage de nicotine. Dans son expérience les rats s'auto-administraient de la nicotine en actionnant un levier. Pour intégrer le rôle d'un stimulus dans l'expérience, l'action du levier était renforcée visuellement par un indicateur lumineux.


Si la nicotine est à elle seule responsable de l'addiction, les sujets qui s'administrent des doses régulières de nicotine vont alors chercher à maintenir cet apport. Si le produit disparait, le geste disparaitra alors aussi.


Or Molimard raconte que “la nicotine s’est montrée nécessaire pour obtenir le comportement [dépendance], mais celui-ci continuait en son absence, comme si elle avait gravé en mémoire le stimulus associé.”

 En effet, après une certaine période d'exposition, les rats auraient continuer à actionner le levier alors même que cette action n'entrainait plus de délivrance de nicotine. Ce comportement dépourvu de récompense chimique aurait duré pendant les trois mois qui ont suivi l'arrêt de nicotine !
Continuer de vapoter en baissant son taux de nicotine


Mais quel était le but de ces rats ? Il faut avouer que le parallèle avec l'ex-fumeur qui au bout de quelques mois ne vapote plus que des e-liquides sans nicotine est fort intéressant. Pour moi, qui vapote aujourd'hui des e-liquides à 6mg/ml de nicotine avec la même fréquence qu'il y a un an (12mg/ml), je trouve cette hypothèse très intrigante.


En poursuivant mes lectures j'ai trouvé des théories qui vont dans le même sens, notamment celle de Donny et Al. [3] qui explique que la nicotine influencerait le comportement de deux manières : en agissant comme un renforçateur primaire quand elle est subordonnée à un comportement, et en potentialisant directement les propriétés du renforcement d'autres stimuli par un mécanisme non associatif.

 Tel que je l'ai compris, le fumeur chercherait de la nicotine, mais chercherait également ce qui entoure cette prise de nicotine.
Les vapoteurs seraient-ils en quelques sortes des “tatoués” à la nicotine ? Auraient-ils besoin de répéter ce geste même si leurs e-liquides ne contiennent plus de nicotine ? Existe-t-il une mémoire de l'addiction, une image fantôme qui demande à être entretenue même en l'absence du principe actif ?
Tout comme les rats de Cohen et ceux de Donny, serais-je devenu accroc aux stimuli ?
Une chose est sûre : la dépendance tabagique est un sujet très compliqué et la science tente encore de l'expliquer. 

Les campagnes de lutte contre le tabagisme se sont par exemple multipliées aux États-Unis, le tabac tue, tout le monde le sait. Ce sont bien 70% des fumeurs américains qui souhaitent s'arrêter, mais seuls 6% d'entre eux vont réellement y arriver.


Conclusion.


Je n'ai fait que parcourir le sujet en survolant les papiers qui m'ont semblé pertinents, mais de ces quelques lectures je tire cinq conclusions principales :
Selon un certain courant scientifique, dire que la nicotine est addictive est faux. Elle serait plutôt un élément “participant” à l'installation d'une dépendance “contextuelle” chez le fumeur.


La cigarette électronique pourrait tirer son efficacité dans le maintien des stimuli auparavant associés à l'action de fumer (geste, rendu visuel de la fumée, aspect en bouche, goût, etc.). En présence de nicotine, la transition cigarettes / cigarettes électroniques se trouve surement optimisée et pourrait expliquer le succès fulgurant du produit auprès des fumeurs.


La cigarette électronique (contenant de la nicotine) pourrait contribuer au renforcement du comportement (vapoter). Elle aurait un potentiel addictif moindre (en comparaison avec les cigarettes) dans la mesure où peu d'élément chimiques viennent s'associer à la vapeur qu'elle dégage.


Pour un Vapoteur, l'intérêt de réduire son taux de nicotine dans les E Liquides n'est pas négligeable afin de ne pas favoriser un renforcement comportemental inutile (même si cela reste à chacun d'en juger).
Tout porte à croire qu'il existe  une grande différence entre l'effet de la nicotine des cigarettes traditionnelles et celle contenue dans les e-liquides des cigarettes électroniques.

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